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samedi 18 décembre 2010

La philosophie pour enfants dans une classe primaire

La philosophie pour enfants fut introduite par le professeur et le pédagogue américain Matthew Lipman au XXe siècle. C’est une pratique éducative qui a notamment comme objectif de dépasser le débat d’opinion « par une problématisation d’une réflexion de portée universelle sur la présence, la signification, les buts et conséquences de l’existence de l’Homme et du Monde »[1]. La philosophie pour enfants aurait, selon certains chercheurs, de nombreuses retombées positives sur les enfants. L'article qui suit portera sur cette question : quels sont les impacts de l’enseignement de la philosophie à l’école primaire? Selon Bruce Demaugé-Bost, l’auteur ayant écrit le texte sur lequel ce travail porte, il y aurait plusieurs impacts au niveau personnel chez l’enfant, au niveau de la dynamique de classe et sur les capacités des enfants dans d’autres matières. Avant d’aborder l’aspect ci-dessus dans le travail qui suit, la pratique sera située dans une perspective théorique et il sera question de l’insertion de la philosophie dans le programme du MELS.

Perspective théorique

Pratiquer la philosophie en classe, c’est articuler trois principes : la conceptualisation, la problématisation et l’argumentation. Ces principes s’inscrivent dans la ligne de pensée du pédagogue Célestin Freinet. Le fondement principal sur lequel s’appuie ce penseur en ce qui concerne les mécanismes d’apprentissage de l’enfant est le tâtonnement expérimental. Il s’agit de : « laisser les enfants émettre leurs propres hypothèses, faire leurs propres découvertes, éventuellement constater et admettre leurs échecs, mais aussi parvenir à de belles réussites dont ils peuvent se sentir les vrais auteurs [...] »[2]Reconnaissant l’enfant comme un être à part entière égal à l’adulte, Freinet le voit comme un être actif, un communicateur chez qui la parole est importante. Pour lui, l’être humain est unique et il a le besoin fondamental d’exprimer son identité. La pratique de la philosophie va en ce sens puisqu’elle laisse la liberté à tous de donner son opinion et de partager ses expériences. Cependant, même si l’homme a un caractère individuel, c’est dans sa nature de vivre en collectivité dans un esprit de collaboration. La réflexion sur des questions sociales, comme il est parfois question dans la philosophie pour enfant, suit donc l’optique de Freinet qui suggère que l’école doit préparer « l’obtention d’une société nouvelle, socialiste et solidaire »[3].

Ces fondements s’inscrivent dans une théorie épistémologique empiriste, qui propose que l’être humain connaisse par l’expérience sensorielle. En effet, au travers du tâtonnement expérimental dans les différentes matières scolaires, l’homme se représente la réalité qui a ses propriétés propres (réalité en soi). Au cours de cette recherche de vérité de l’objet, des idées sensibles ou simples sont copiées de l’environnement dans l’esprit de l’apprenant d’une manière passive, notamment par répétition. L’esprit de l’apprenant s’active ensuite d’une façon inconsciente pour assembler ces « reproductions » de l’objet selon leur ressemblance pour former des idées complexes. Dans la pratique philosophique, cela se fait entre-autre par l’échange d’idées dans la communication avec autrui où l’enfant peut structurer son point de vue et le comparer à celui des autres. Dans un esprit de coopération, les autres élèves ont donc un impact inconscient sur la façon dont l’enfant perçoit la réalité. Même si la pratique de la philosophie pour enfants dans une pédagogie Freinet se rattache davantage à la pensée empiriste, le pédagogue parle quand même de l’enfant qui donne un sens la réalité. De plus, puisque les questions posées lors de telles discussions sont souvent sans réponse et que l’enfant doit donner son opinion en se basant sur ses expériences, on pourrait penser qu’il n’y a pas de vérité absolue. Or, ces pensées se situent plutôt dans le courant de pensée rationaliste.

L’insertion de la philosophie pour enfants dans le programme de formation

La pratique des débats philosophiques a-t-elle sa place dans une classe primaire quand on considère que les enseignants manquent souvent de temps pour travailler sur la totalité de leur matière? Quand on se penche sur certaines sections du programme de formation (français, éducation à la citoyenneté, éthique et culture religieuse, compétences transversales), on réalise que les débats philosophiques peuvent avoir leur place pour développer plusieurs compétences. En premier lieu, pour le domaine du français, la pratique du débat philosophique amène l’enfant à mieux maîtriser la langue en général, et ce, dès la maternelle, car « c’est dans l’oral d’abord que l’on apprend à lire et à écrire »[4]. En discutant de la sorte, autant les enfants du préscolaire que du primaire s’imprègnent de la structure de la langue et apprennent du nouveau vocabulaire. Selon Bruce Demaugé-Bost, « il est manifeste que leur vocabulaire et leur expression deviennent plus rigoureux »[5].


Le domaine de l’éducation à la citoyenneté est touché, quant à lui, dans la perspective où les enfants apprennent « à se situer dans un horizon plus large que celui de l’école »[6]. Cela apporte, selon l’auteur, l’ouverture d’esprit aux enfants[7]. L’enfant est amené à faire une réflexion sur les valeurs civiques qui régissent la société et à se situer par rapport à celles-ci. C’est un premier pas vers un objectif de vivre ensemble dans une attitude de respect.
À travers la discussion philosophique, l’enseignant pourra aussi intégrer des notions d’éthique et culture religieuse puisque la compétence 3 du programme du MELS concerne le débat éthique. Pour terminer, les compétences transversales de l’ordre personnel et social et de l’ordre de la communication sont impliquées dans la discussion philosophique.

Les impacts de la philosophie pour enfant

Selon Bruce Demaugé-Bost, les élèves peuvent apprendre beaucoup de choses par la pratique de la philosophie. Il a été possible de voir ci-dessus qu’un enseignant peut intégrer la philosophie pour enfants dans plusieurs matières, mais Bruce Demaugé-Bost va encore plus loin. Il affirme qu’ il peut y avoir une corrélation entre les interventions des enfants dans les débats et le reste de leur travail en classe[8]. Selon les enseignants interviewés dans le cadre de sa recherche, la pratique de la philosophie en classe peut rendre les enfants capables d’abstraction, et l’élève « qui a acquis l’abstraction, il va le faire en maths et en philo, c’est sûr »[9].

Cependant, ces apprentissages et les avantages de cette pratique ne se situent pas uniquement au niveau scolaire. Premièrement, un enfant peut augmenter considérablement son niveau de confiance en soi[10]. En effet, certaines réactions positives de ses pairs ou de l’enseignant lors de débats peuvent amener chez l’élève « des modifications de sa propre conception de lui-même en tant qu’élève et de sa propre relation au monde scolaire suffisantes pour amener une évolution notable de ses performances scolaires »[11].

Aussi, selon Bruce Demaugé-Bost, cette pratique pourrait avoir un impact non négligeable sur la dynamique de classe. En effet, selon les résultats de ses recherches, l’enseignement de la philosophie en classe instaure un climat d’écoute et de respect entre les élèves[12]. De plus, selon le même auteur, il y aurait de nombreux effets sur la conduite des enfants, « par exemple, le fait d’avoir parlé des moqueries ou des injustices modifie le regard, les relations dans la classe »[13]. Les élèves utilisent aussi les compétences et les expériences vécues dans les ateliers philosophiques pour mieux gérer les conflits. D’après l’auteur et des enseignants qui font de la philosophie en classe, cette pratique fait changer les choses, « les individus changent, ils gagnent plus d’estime de soi, mais le groupe aussi : il devient pensant en tant que groupe »[14]. En contexte de situation d’apprentissage, l’auteur transpose cet esprit de solidarité. Il affirme qu’une dynamique de réflexion s’installe dans le groupe : les enfants ne sont « plus seulement des élèves, mais aussi des enfants qui s’exercent à réfléchir ensemble »[15].

Pour conclure, je réalise que les impacts de la pratique de la philosophie en classe sont nombreux. Premièrement, cette pratique qui s’inscrit dans une théorie épistémologique empiriste peut rejoindre plusieurs composantes dans le programme de formation du MELS, permettant ainsi à l’enseignant d’enseigner ou d’évaluer de nombreux aspects. Après avoir lu le mémoire de Bruce Demaugé-Bost[16] et des commentaires des enseignants qu’il a interviewés, mon intérêt pour cette pratique a augmenté considérablement. En effet, je prévois utiliser cette pratique dans ma future classe. Je suis convaincue que de tels questionnements peuvent être bénéfiques, comme il a été question dans la deuxième partie du travail, au niveau personnel pour l’enfant, au niveau de la dynamique de classe et les performances des enfants dans d’autres matières. La gestion d’une classe étant un des plus gros défis pour un enseignant, je considère que cela vaut la peine de faire de tels ateliers qui aideront à développer des aptitudes de résolution de conflits dans une classe et donc de « gagner du temps » à ce niveau. Cependant, il faut faire attention pour impliquer les élèves qui ont davantage de difficulté dans de telles activités. En effet, si un enseignant ne fait pas attention pour faire en sorte que tous participent, je crois que ces ateliers peuvent renforcer les compétences des plus forts sans avoir d’impact significatif sur les plus faibles. Finalement, je crois fermement que l’éducation doit « former en l’enfant l’homme de demain, ouvrier actif et conscient d’une société de progrès, de liberté et de paix »[17], pour reprendre les mots de Freinet. Dans notre société, je suis convaincue que le fait de susciter le questionnement et la réflexion chez les enfants nous aiderait à former de meilleurs citoyens pour l’avenir. Dans une prochaine recherche, il serait intéressant de se pencher sur les résultats à long terme des débats philosophiques.

[1] DEMAUGÉ-BOST, Bruce. La pratique des débats philosophiques à l’école. 2002.[En ligne] http://bdemauge.free.fr/philosophie/philosophie.pdf. Consulté le 8 octobre 2010. (p.6)[2] DORANCE, Sylvia et FOURMÈS, Ginette. La danseuse sur un fil : une vie d'école Freinet. Ed. École vivante. 2009[3] DEMAUGÉ-BOST, Op cit, p.8.[4] Ibid, p.19.[5] Ibid, p.24.[6] Ibid, p.22.[7] Ibid, p.24.[8] Ibid, p.22.[9]Idem [10] Ibid, p.27.[11] Idem[12] Ibid, p.23.[13] Ibid, p.24.[14] Idem[15] Idem[16] Ibid[17] FREINET, Célestin, Les techniques Freinet de l'école moderne, Paris, Editions : LibrairieArmand Colon, Collection BOURRELIER, Carnet de pédagogie pratique, 326,1964, p.144

Médiagraphie

DEMAUGÉ-BOST, Bruce. La pratique des débats philosophiques à l’école. 2002. [En ligne] http://bdemauge.free.fr/philosophie/philosophie.pdf. Consulté le 8 octobre 2010 DORANCE,

Sylvia et FOURMÈS, Ginette. La danseuse sur un fil : une vie d'école Freinet. Ed. École vivante. 2009 FREINET, Célestin, Les techniques Freinet de l'école moderne, Paris, Editions : Librairie Armand Colon, Collection BOURRELIER, Carnet de pédagogie pratique, 326, 1964,144 p.

FREINET, Célestin, Les techniques Freinet de l'école moderne, Paris, Editions : LibrairieArmand Colon, Collection BOURRELIER, Carnet de pédagogie pratique, 326,1964, p.144

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