Dans mon stage de première année, qui s’est déroulé en 5ième année dans un milieu très défavorisé, les enfants manquaient beaucoup de confiance en eux. Ils me demandaient constamment d’approuver leurs travaux ou leurs comportements. Ils disaient souvent « je ne comprends rien!» et ils se décourageaient facilement devant les tâches scolaires. De plus, j’avais beaucoup de problèmes de gestion de conflits, de violence, etc.
Voulant améliorer la situation, j’ai demandé à mon enseignante associée si elle voulait mettre en place un conseil de coopération avec moi. Malheureusement, elle n’a pas désiré se lancer dans ce projet par manque de temps. Cependant, elle m’a laissé expérimenter un volet du conseil de coopération, soit les félicitations. En choisissant ce volet, je désirais que les enfants prennent confiance en eux et vivent des réussites. Je voulais que les élèves se valorisent entre eux par le renforcement positif. J’ai aussi profité de cette occasion pour parler de différentes valeurs qui sont importantes pour moi. Ainsi, je voulais donner aux enfants des pistes pour féliciter les autres. Donc, à chaque semaine, nous avions une valeur de la semaine. Les élèves devaient être attentifs aux manifestations de cette valeur dans la classe et féliciter les autres, entre autre, pour cet aspect.
À la fin de la semaine, nous nous assoyions en grand cercle et les auteurs des félicitations lisaient leur message aux autres. Quelle joie de voir les visages des enfants et leurs yeux brillants de fierté! Ils pouvaient repartir à la maison avec leur félicitation et la montrer à leurs parents. Pour plusieurs parents, qui avaient souvent des messages négatifs de la part de l’école, cela a été positif de voir les réussites de leur enfant.
En s’appuyant sur les félicitations des enfants, je choisissais deux étoiles de la semaine à chaque vendredi. Ils repartaient chez eux avec un diplôme. Je pense que ce système a été une réussite dans le sens où il a permis aux enfants de vivre des réussites. Je suis convaincue que cela a aussi stimulé les enfants à adopter des attitudes empreintes des « valeurs vedettes ». Mais, pour que cela soit pleinement efficace, il faudrait avoir recours à toutes les parties du conseil de coopération.
Albert Jaquard a dit: « Il est difficile d'utiliser les inévitables conflits de façon à en faire des moteurs, des sources de créativité bénéfique pour tous. Le problème est particulièrement difficile dans cette collectivité réactive qu'est une classe. Trop souvent un enseignement basé sur la compétition exacerbe ces conflits et détruit les enfants, fait d'eux des décrochés. »
Dans ma future classe, j'utiliserai le conseil de coopération comme un moteur pour faire de la résolution de conflit un outil pour promouvoir le vivre-ensemble. Définissons d'abord ce qu'est un conseil de coopération. Selon Danielle Jasmin, « le conseil de coopération est un lieu de gestion où chaque enfant à sa place, où l'individu et le groupe ont autant d'importance l'un que l'autre et où les dimensions affectives et cognitives sont traitées en équilibre. Il sert à développer des habiletés sociales de coopération, à faire l'apprentissage des droits collectifs et individuels avec la conscience des responsabilités que ces droits supposent.»
Je crois que ce système est très intéressant pour l'enseignant car cela lui enlève le poids qu'elle doit souvent porter seule de la résolution des conflits. Selon Danielle Jasmin, ce conseil "permet de mettre en place une troisième personne symbolique ou morale qui nous libère émotivement". Lors de mes deux stages précédents, je trouvais souvent cela lourd et long de résoudre les conflits des enfants. Le conseil de coopération fait en sorte que les enfants vont critiquer les autres élèves au moment prévu le vendredi, faire des messages clairs directement ou faire des gestes de réparation. Il y a donc une grande économie de temps et d'énergie dans la classe, et comme nous l'avons vu dans notre cours de gestion de classe, les interventions de gestion de classe des nouveaux enseignants font qu'ils perdent beaucoup de temps d'enseignement!
De plus, je trouve cela bien car ce n'est pas une mesure punitive, mais un système qui vise le développement de compétences du vivre-ensemble. En effet, comme le dit Danielle Jasmin: « le conseil de coopération n'est pas un tribunal, on y cherche des responsables, plutôt que des coupables, on essaie de rendre justice, sans pour cela condamner le responsable, mais pour l'aider». Il ne cherche pas à éliminer les conflits dans la classe, mais à apprendre à les régler.
Le conseil de coopération fait aussi la promotion de valeurs que je désirerais transmettre à mes élèves, soit des valeurs de respect, de tolérance, d'ouverture, de démocratie, etc. Danielle Jasmin dit que dans sa classe, elle assiste souvent à des moments uniques de solidarité, de prise de conscience et de compassion lorsqu'elle utilise le conseil. Il est très important pour moi que les enfants apprennent à agir en fonction de telles valeurs de façon autonome car ils deviendront des citoyens plus conscients et responsables.
Le conseil de coopération: un outil pédagogique pour l'organisation de la vie de classe et la gestion des conflits, Danielle Jasmin, Chenelière/Didactique, 1994, 121 p.